1. Opposition à l’injonction de payer européenne
Procédure de l’opposition
Pour protéger le défendeur, celui-ci peut s’opposer à l’injonction de payer européenne conformément aux articles 16 et 17.
L’article 16.1 du règlement prévoit que le défendeur peut former opposition à l’injonction de payer européenne non-exécutoire auprès de la juridiction d’origine dans un délai de trente jours, à compter de la signification de l’injonction au défendeur, au moyen du
formulaire type F figurant dans l’annexe VI qui lui est transmis en même temps que l’injonction de payer européenne.
Le défendeur est simplement tenu de s’opposer à l’injonction de payer européenne. Il ne doit préciser aucun motif de contestation.
L’opposition est introduite selon l’article 16.4 sur support papier ou par tout autre moyen de communication accepté par l’État membre d’origine et utilisable par la juridiction d’origine, y compris par voie électronique.
Délai de trente jours
Selon l’article 16.2 du règlement, ce délai commence à courir à compter de la signification ou de la notification de l’injonction de payer européenne au défendeur.
L’article 18 dispose que l’injonction de payer européenne peut devenir exécutoire après ce délai de trente jours. De plus, l’article 17.1 prévoit qu’en cas d’opposition dans le délai de trente jours, la procédure se poursuit devant les juridictions de l’État membre d’origine. De ces deux articles, on peut déduire qu’une opposition formée tardivement doit être déclarée irrecevable.
Effets de l’opposition
L’opposition intentée de manière régulière et dans le délai de trente jours par le défendeur a pour conséquence la poursuite de la procédure devant les juridictions compétentes de l’État membre d’origine conformément aux règles de la procédure civile ordinaire interne.
Le demandeur peut cependant éviter la poursuite de la procédure lorsqu’il a expressément demandé qu’il y soit mis un terme dans ce cas. Ceci lui permet d’éviter d’engager des frais qui sont disproportionnés par rapport à la créance qu’il désire recouvrer.
Selon l’article 17.2 du règlement, le passage à la procédure civile ordinaire est régi par le droit de l’État membre d’origine. Chaque État membre devra par conséquent adapter sa législation afin de déterminer comment s’effectue le passage de la procédure européenne unilatérale d’injonction de payer vers une procédure contradictoire nationale.
Enfin, afin de ne pas nuire aux intérêts du demandeur, l’article 17.1 al. 2 prévoit que lorsque ce dernier a fait valoir sa créance en recourant à la procédure européenne d’injonction de payer, aucune disposition du droit national ne porte atteinte à sa position lors de la procédure civile ordinaire ultérieure.
Le jugement rendu sur opposition circulera dans les mêmes conditions qu’une décision interne.
2. Réexamen dans des cas exceptionnels
Généralités
Lorsque le défendeur ne fait pas opposition à l’injonction de payer européenne dans le délai de trente jours de sa signification, celle-ci devient définitive et plus aucun recours ne peut être intenté.
Le législateur européen a tout de même laissé apparaître dans l’article 20 une possibilité de réexamen dans des cas exceptionnels. Selon le considérant 25, ce recours ne doit pas s’analyser comme étant un recours ordinaire tel que l’opposition.
Ce considérant précise « Considérant 25 : « (…) Le droit de demander un réexamen dans des circonstances exceptionnelles ne devrait pas signifier que le défendeur dispose d’une deuxième possibilité de s’opposer à la créance. Au cours de la procédure de réexamen, l’évaluation du bien-fondé de la créance devrait se limiter à l’examen des moyens découlant des circonstances exceptionnelles invoquées par le défendeur. (…) ». Il en résulte que l’interprétation de cet article doit se faire de manière restrictive.
Cas de réexamen
Le réexamen dans des cas exceptionnels est possible dans trois cas :
- Article 20.1 a) : Lorsque l’injonction de payer européenne a été signifiée ou notifiée sans avoir la preuve de la réception par son défendeur (article 14) et que le défendeur n’a pas eu le temps du fait de la signification tardive de préparer sa défense, sans qu’il y ait faute de sa part. Tant que la signification de l’injonction de payer n’est pas intervenue, le défendeur dispose d’un délai de trente jours pour former opposition. Il n’y par conséquent aucune raison de rallonger le délai lorsque la signification ou la notification n’est pas encore intervenue.
- Article 20.1 b) : Lorsque le défendeur a été empêché de contester la créance pour cause de force majeure ou en raison de circonstances extraordinaires, sans qu’il y ait faute de sa part. Dans le cadre du règlement (CE) n° 805/2004, la possibilité de contester la créance pour cause de force majeure ou en raison de circonstances extraordinaires est une condition de la certification de la décision en tant que titre exécutoire européen. Au niveau du règlement (CE) n° 1896/2006, il s’agit cette fois d’un réexamen dont dispose le défendeur lorsque la juridiction d’origine a délivré une injonction de payer européenne.
- Article 20.2 : Le défendeur a également le droit de demander le réexamen de l’injonction de payer européenne lorsqu’il est manifeste que l’injonction a été délivrée à tort au vu des exigences fixées par le règlement ou en raison d’autres circonstances exceptionnelles. Dans cette hypothèse, un réexamen est possible, soit au vu des exigences fixées par le règlement, soit en raison d’autres circonstances exceptionnelles.
Conséquences du réexamen dans des cas exceptionnels
Lorsque la juridiction rejette la demande du défendeur au motif qu’aucune des conditions de réexamen énoncées aux paragraphes 1 et 2 de l’article 20 n’est remplie, l’injonction de payer européenne reste valable.
En revanche si la juridiction décide que le réexamen est justifié au motif que l’une des conditions énoncées aux paragraphes 1 et 2 de l’article 20 est remplie, l’injonction de payer européenne est nulle et non avenue.
Conclusion
Le règlement ne prévoit par cet article 20 que les cas de réexamens qui peuvent être intentés par le défendeur dans l’État membre d’origine ainsi que les conséquences.
Le règlement ne prévoit ni formulaire pour le réexamen, ni la manière dont le défendeur est mis au courant de la possibilité d’introduire une procédure de réexamen, ni la juridiction qui doit connaître de ce réexamen.
3. Refus d’exécution (article 22)
Principe
Le défendeur dispose de moyens afin de s’opposer à l’exécution de l’injonction de payer européenne. Ces moyens sont introduits devant les juridictions de l’État membre d’exécution et non dans l’État membre d’origine.
Mais comme le précise l’article 22.3, une injonction de payer européenne ne peut jamais faire l’objet d’un réexamen au fond dans l’État membre d’exécution.
L’exécution ne peut être refusée que pour deux motifs, à savoir :
- S'il existe une incompatibilité avec une décision rendue antérieurement
- Ou si le défendeur a payé au demandeur le montant fixé dans l’injonction de payer européenne.
Incompatibilité avec une décision antérieure
L’exécution est refusée par la juridiction compétente dans l’État membre d’exécution si l’injonction de payer européenne est incompatible avec une décision rendue ou une injonction délivrée antérieurement dans tout État membre ou dans un pays tiers lorsque trois conditions cumulatives sont remplies :
- Lorsque la décision rendue ou l’injonction délivrée antérieurement l’a été entre les mêmes parties dans un litige ayant la même cause ;
- Lorsque la décision rendue ou l’injonction délivrée antérieurement réunit les conditions nécessaires à sa reconnaissance dans l’État membre d’exécution ;
- Lorsque l’incompatibilité n’aurait pas pu être invoquée au cours de la procédure judiciaire dans l’État membre d’origine.
Payement préalable
L’exécution est également refusée par la juridiction compétente dans l’État membre d’exécution si le défendeur a payé au demandeur le montant fixé dans l’injonction de payer européenne.
4. Suspension ou limitation de l’exécution (article 23)
En vertu de l'article 23 du règlement, le défendeur peut, lorsqu’il a demandé un réexamen conformément à l’article 20, neutraliser l’exécution de l’injonction de payer européenne en introduisant une demande devant la juridiction compétente dans l’État membre d’exécution. La juridiction saisie peut prendre diverses mesures étant :
- Soit limiter la procédure d’exécution à des mesures conservatoires ;
- Soit subordonner l’exécution à la constitution d’une sûreté qu’elle détermine ;
- Soit, dans des circonstances exceptionnelles, suspendre la procédure d’exécution.