De G. à D. : Jean-Michel Rouzaud, président de l’ENP de Paris, Leo Netten, président de l’UIHJ, Marie-Elise Gbedo, ministre de la justice du Bénin, Wakili Laguidé, président de la Chambre nationale des huissiers de justice du Bénin, Honoré Aggrey, vice-président de l’UIHJ
Une justice performante et crédible, susceptible d'attirer des flux d'investissements
L'Unité de formation des huissiers de justice africains (Ufohja) fête cette année son dixième anniversaire. Elle a été créée en 2002 par l'UIHJ en coopération avec l'Ecole nationale de procédure de Paris (ENP) et les chambres nationales des huissiers de justice des pays de la zone du traité de l'Organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires (Ohada) membres de l'UIHJ. L'Ufohja a pour objet d'assurer la formation des huissiers de justice africains au droit Ohada applicable dans les seize pays de la zone. Les séminaires de formation se tiennent à la fréquence de deux ou trois par an. Il revenait au Bénin d'organiser le premier séminaire de l'année 2012. C'est Cotonou, la capitale économique, qui a été choisie pour accueillir les participants. Le thème général du séminaire était « Le contrat de location et son exécution ».
Neuf pays de la zone Ohada ont répondu à l'appel : Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Congo, Côte d'Ivoire, Gabon, Niger, Sénégal et Togo. Les trente-et-un huissiers de justice du Bénin étaient présents. L'UIHJ était représentée par son président, Leo Netten, son vice-président, Honoré Aggrey, sa secrétaire général, Françoise Andrieux, et son premier secrétaire, Mathieu Chardon. L'ENP était représentée par son président, Jean-Michel Rouzaud, et par Anne Kérisit, expert ENP et Ufohja. Des magistrats, procureurs, avocats et hautes personnalités s'étaient également déplacés pour suivre les travaux.
Wakili Laguidé, président de la Chambre nationale des huissiers de justice du Bénin, a fait part de sa fierté d'avoir été chargé d'organiser avec l'UIHJ ce 30e séminaire Ufohja. Il a souhaité la bienvenue à tous les participants venus d'Europe et d'Afrique. Au nom de la chambre béninoise, le président Laguidé a remercié madame le garde des Sceaux, ministre de la justice, de la légalisation et des droits de l'homme, porte-parole du Gouvernement, « pour sa sollicitude permanente durant l'organisation des présentes assises et, surtout, l'honneur qu'elle nous fait de présider personnellement la cérémonie d'ouverture de notre séminaire ». Il a également remercié le président de l'UIHJ, Leo Netten, pour sa disponibilité permanente, dans la continuité des efforts de son prédécesseur, Jacques Isnard, en vue du renforcement du professionnalisme des huissiers de justice. Enfin, le président des huissiers de justice du Bénin a remercié l'ENP ainsi que les autorités judiciaires du Bénin, celle de la police et de la gendarmerie et toutes les hautes personnalités ayant accepté d'honorer de leur présence la cérémonie d'ouverture. Le président Laguidé a évoqué les assises de Dakar de 1996. A cette occasion, a-t-il rappelé, un constat avait été fait que les maux dont souffrait la profession étaient sensiblement les mêmes d'un pays à l'autre. « Nos défis sont donc communs et les mutations induites par l'appartenance à un même environnement juridique exigent davantage de nous, a poursuivi l'orateur. La poursuite et le renforcement de la formation professionnelle continue, voire l'exploration d'autres pistes peuvent faire des huissiers de justice des acteurs efficaces de l'œuvre de justice ».
Le thème du contrat de location et son exécution s'inscrit dans cette droite ligne. La justice est un secteur déterminant dans tout développement économique social durable. Elle doit s'appuyer sur des huissiers de justice compétents et rompus à la tâche. Ces professionnels sont les garants, aussi bien individuellement que collectivement, de la bonne image de la profession. Un huissier de justice professionnellement averti, respectueux de la déontologie de la profession et irréprochable sur le terrain éthique est une garantie incontestable pour le bon fonctionnement de la justice. « Le présent séminaire s'inscrit donc dans la ligne de la politique que mènent nos Etats pour une justice performante et crédible, susceptible d'attirer des flux d'investissements en direction de nos pays ». Le président Laguidé s'est souvenu que le Bénin avait été le premier pays à avoir accueilli le conseil permanent africain de l'UIHJ en 1999. Ensuite, le Bénin avait accueilli un séminaire Ufohja en 2005 sur le thème du recouvrement de créance. Souhaitant à tous un bon séjour, Wakili Laguidé s'est dit convaincu qu'au cours des deux journées de séminaire allaient jaillir « de bonnes résolutions et surtout une meilleur pratique professionnelle ».
Renforcer les capacités et le professionnalisme des huissiers de justice
A sa suite, Leo Netten, président de l'UIHJ, a fait part de sa joie d'être à Cotonou, capitale économique du Bénin. Il a souligné qu'en temps de crise, une capitale économique doit s'appuyer sur la sécurité juridique qui permet de garantir le respect des droits de chacun. « La crise déstabilise nos systèmes bancaires et économiques. La confiance dans les affaires s'est considérablement altérée du fait de l'explosion du système économique : des entreprises ferment leurs portes et des pays entiers sont presque en état de faillite » s'est-il inquiété. Les partenaires économiques doivent alors multiplier leurs exigences en termes de sécurité juridique. L'exécution des décisions de justice est un élément essentiel du fonctionnement d'un Etat fondé sur la primauté du droit. Pour cela les processus d'exécution doivent être effectifs et équitables. Pour répondre aux impératifs d'efficacité, la profession d'huissier de justice s'est imposée au fil du temps. Le président Netten s'est ensuite attardé sur les lignes directrices du Conseil de l'Europe du 17 décembre 2009 sur l'exécution. Ces lignes directrices ont été préparées par la Commission européenne pour l'efficacité de la justice (CEPEJ). L'UIHJ a activement participé à leur rédaction. Dans ce texte fédérateur, il est indiqué que l'huissier de justice devrait avoir la responsabilité de la conduite des opérations l'exécution. « Pour cela, a poursuivi Leo Netten, l'huissier de justice a besoin d'une formation, initiale et continue ». L'UIHJ a fait de la formation l'un de ses objectifs principaux dès sa création, a-t-il rappelé. C'est cette vocation mondiale qui offre la possibilité d'organiser des sessions de formation dans différentes parties du monde, et notamment en Afrique, où, en collaboration avec l'ENP, elle œuvre à la connaissance des instruments Ohada pour harmoniser le statut et les activités des huissiers de justice. Le président Netten a terminé son intervention en faisant la promotion du congrès international qui se tiendra des 2 au 4 mai 2012 à Cape Town (Afrique du Sud). Il a convié chacun à y participer.
Marie-Elise Gbedo, ministre de la justice du Bénin a souhaité au nom du gouvernement de la République du Bénin et de son président, Boni Yayi, la bienvenue en terre béninoise à toutes les délégations venues d'Europe et d'Afrique pour prendre part au séminaire international de formation des huissiers de justice. La ministre a rappelé qu'en 2012, le Bénin assurait les présidences de l'Union africaine et de la Conférence des chefs d'Etats et de gouvernement de l'espace Ohada. Elle a salué l'initiative de l'Ufohja d'organiser à Cotonou « une session de formation dont l'objectif est de renforcer les capacités et le professionnalisme de ses membres dans le cadre de la consolidation de l'Etat de droit et de la justice dans nos pays respectifs ».
Mme Gbedo a par ailleurs exprimé aux responsables de l'Ufohja la gratitude du gouvernement du Bénin pour le choix porté sur son pays ainsi que la confiance qu'ils témoignent en la Chambre nationale. La ministre de la justice a rappelé que les défis de la mondialisation ont imposé aux sociétés un mouvement en faveur de l'harmonisation, voire de l'uniformisation des règles, usages et pratiques qui gouvernent la vie sociale et le monde des affaires. Pour autant, « dans le contexte africain, la mise en œuvre des règles juridiques est souvent confrontée à un paradoxe en ce qu'elle s'adresse à des personnes souvent attachées à des valeurs et pratiques traditionnelles, parfois étrangères aux préoccupations du monde moderne, à des réalités sans commune mesure avec le droit. Ce contexte rend souvent le ministère de l'huissier de justice difficile à comprendre du grand public » a-t-elle analysé. Le séminaire permettra donc, a conclu Mme Gbedo, de partager les préoccupations et les expériences de chacun pour résoudre les questions touchant, à la conclusion et au contentieux du bail à usage professionnel et du bail à usage d'habitation. La ministre de la justice a clôt son intervention en déclarant ouvert le 30e séminaire Ufohja.
Leo Netten a aussitôt remercié la ministre de la justice pour ses propos. Il lui a remis officiellement la médaille d'or de l'UIHJ en témoignage de son intérêt et de son investissement pour la profession.
Le développement constant du niveau de la profession
Il faut saluer la parfaite organisation du séminaire, savamment orchestrée par un comité d'organisation ultra performant avec, à sa tête Monique Kotchofa Faihun, vice-présidente de la Chambre nationale, et la complicité d'un maître de cérémonie d'un grand professionnalisme, Simplice Dako, huissier de justice à Cotonou.
Chacun a pu apprécier la densité et la richesse des travaux et discussions. L'ambiance était studieuse, amicale, chaleureuse et confraternelle. Pendant deux journées intenses, près de 120 participants ont pu écouter, apprendre, discuter et échanger. Décidément, chaque nouveau séminaire Ufohja témoigne du développement constant du niveau de la profession d'huissier de justice en Afrique s'agissant de la connaissance et de la maîtrise des instruments Ohada.
Le bail était au cœur des débats. Le choix de ce thème s'est révélé très porteur. Il a suscité le plus vif intérêt des participants.
La première communication s'est intéressée au bail professionnel (bail commercial) et son exécution. Ce panel était placé sous la modération d'Hortense Bankolé de Souza, ancienne présidente de la chambre nationale des huissiers de justice du Bénin. Les interventions ont été présentées par le docteur Gaston Kenfack Douajni (Cameroun), expert Ohada, pour ce qui concerne ce droit, et par Françoise Andrieux, pour ce qui concerne les spécificités en droit français. Cette double présentation avait pour but de permettre des analyses de droit comparé.
La deuxième communication concernait le contentieux du bail à usage professionnel. Claudine Mougni, ancienne présidente de la Chambre nationale des huissiers de justice du Bénin, en assurait la modération. Le docteur Kenfack Douajni et Mathieu Chardon ont évoqué tour à tour les aspects de la question en droit Ohada et en droit français.
Chaque communication a été suivie d'un débat avec la salle, par un jeu de questions nombreuses et pertinentes. L'après-midi fut consacrée à l'étude de cas pratiques.
Les travaux se sont poursuivis le lendemain avec la troisième communication sur le thème du bail d'habitation, son exécution et son contentieux. Claudine Mougni en était la modératrice. Le docteur Kenfack Douajni et Anne Kérisit se sont succédé pour présenter la situation en droit Ohada et en droit français.
A l'instar du panel précédent, les questions furent nombreuses et les échanges très enrichissants, à la fois pratiques et juridiques. Des cas pratiques permirent aux participants d'engager de nouvelles discussions, toujours passionnantes.
La quatrième communication était consacrée à certains éléments de pratique professionnelle : déontologie, gestion des clients, gestion des procédures, règles en matière de constats, d'interpellation et autres. Le modérateur de ce panel était Issaka Moussa Dan Koma, président de la Chambre nationale des huissiers de justice du Niger. Les deux intervenants étaient Alphonse Kibakala, ancien président de la Chambre nationale des huissiers de justice du Congo et Jean-Michel Rouzaud.
L'implication du docteur Kemfack Douajni dans les débats fut particulièrement active. Chacun apprécia la clarté et la précision de son propos. M. Kemfack Douajni a indiqué que l'acte uniforme de l'Ohada sur les voies d'exécution était entré dans son processus de révision. Les huissiers de justice sont au cœur de cet acte uniforme. Il a invité tous les huissiers de justice présents à s'investir pleinement auprès de l'Ohada pour participer à ce grand mouvement législatif.
Pas moins de trois rapports de synthèse furent présentés. Charles Bouvi, huissier de justice au Bénin, s'est concentré sur la première journée. Jérôme Okemba, huissier de justice au Congo, a évoqué la seconde journée. Enfin, Joachim Mitolo, huissier de justice au Congo, a présenté le rapport général du séminaire.
A l'issue du séminaire, André Sama Botcho, président de la Chambre nationale des huissiers de justice du Togo, a confirmé la candidature de son pays pour organiser les 3es rencontres Afrique/Europe des huissiers de justice. Cette candidature a été retenue. C'est donc en 2013 à Lomé que se dérouleront ces troisièmes rencontres. Le thème sera dévoilé dans les prochains mois.
Dans son discours de clôture, le président Laguidé a chaleureusement remercié l'UIHJ, l'ENP et l'Ufohja ainsi que l'ensemble des chefs de délégation et les participants. Le président Netten a souligné la grande qualité des travaux et la parfaite organisation du 30e séminaire Ufohja. Il a remercié et félicité le président Laguidé, son bureau ainsi que le Comité d'organisation pour avoir œuvré au succès du séminaire. Il a également complimenté le professeur Kemfack pour la qualité de ses interventions et les propos qu'il a tenu en incitant les huissiers de justice à s'intégrer au processus législatif de l'Ohada. Il a ajouté qu'en Europe, c'est grâce aux actions constantes de l'UIHJ que les huissiers de justice étaient désormais associés aux travaux des institutions. Le président Netten a annoncé qu'il venait de créer ici à Cotonou, pour l'Afrique, un Comité de surveillance composé de cinq huissiers de justice africains. Ce Comité de surveillance est chargé de suivre de près tous les travaux en cours et d'émettre des propositions. L'objectif est de permettre aux huissiers de justice, à l'instar de leurs homologues européens, d'être pleinement associés aux institutions. Enfin, il a donné rendez-vous à tous les participants à se rendre à Cape Town en mai 2012 pour le 21e congrès international des huissiers de justice.
Les participants se sont retrouvés pour poursuivre les débats autour du dîner de gala offert par la Chambre nationale des huissiers de justice du Bénin, dans une humeur festive, dansante et musicale, une des caractéristiques de nos confrères africains et toujours aussi appréciée.
RAPPORT DE LA JOURNEE DU JEUDI 23 FEVRIER 2012
COTONOU (Bénin) - Février 2012
L'an deux mil douze
Et le jeudi vingt-trois Février
S'est tenue à l'hôtel SUN BEACH à Cotonou la première journée du séminaire international de formation des Huissiers de Justice sur le thème « le contrat de location et son exécution », coorganisé par l'Unité de Formation des Huissiers de Justice Africain (UFOHJA) et la Chambre Nationale des Huissiers de Justice du Bénin avec le soutien de l'Union Internationale des Huissiers de Justice et de l'Ecole Nationale de Procédure de Paris (ENP).
Ce séminaire a vu la participation effective des délégations venues du Burkina-Faso, du Cameroun, du Congo, de la France, du Gabon, du Niger, du Mali, du Sénégal, du Togo aux côtés des Huissiers de Justice du Bénin et des personnes ressources , Magistrats et Avocats ;
La cérémonie d'ouverture a été présidée par Maître Marie-Elise GBEDO, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, de la Législation et des Droits de l'Homme, Porte-parole du Gouvernement, Président du Conseil des Ministres de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires, laquelle a lancé les travaux à la suite des allocutions. Maître WAKILI LAGUIDE, Président de la Chambre Nationale des Huissiers de Justice du Bénin de Maître Léo NETTEN, du Président de l'Union Internationale des Huissiers de Justice ;
A la fin de l'allocution de Madame le Garde des Sceaux, le Président de l'Union Internationale a repris la parole en la remerciant pour sa disponibilité et son intérêt perceptibles à travers son allocution, pour les visées internationalistes de la profession d'Huissier de Justice. En reconnaissance de ce soutien, l'Union Internationale des Huissiers de justice lui a décerné sous les ovations des participants, la médaille d'or ;
Les travaux proprement dits ont commencé après le retrait du Garde des Sceaux, la photo de famille et la pause-café.
La première communication portant sur le thème : ‘'le contentieux du bail à usage professionnel ‘' a été développé par le Docteur Gaston KENFACK DOUAJNI Expert OHADA, sur ses aspects relatifs au droit OHADA et par maître François ANDRIEUX sur ses aspects concernant le droit français, Maître Hortense BANKOLE de SOUZA ayant servi de modératrice.
Le Docteur Gaston KENFACK DOUAJNI a d'abord précisé que la matière du bail à usage professionnel est régie par l'Acte Uniforme révisé sur le droit commercial général qui a été adopté à Lomé le 15 Décembre 2010.
Il a rappelé que l'ancien Acte Uniforme sur le Droit Commercial de 1998 parlait plutôt de bail commercial et que cette terminologie a fait place dans le nouveau droit au terme ‘'professionnel''.
Le communicateur a précisé que le bail à usage professionnel aux termes de l'article 103 de l'Acte Uniforme sur le Droit commercial général « est toute convention écrite ou non entre une personne investie par la loi ou une convention, du droit de donner en location tout en partie d'un immeuble compris dans le champ d'application du présent titre et une autre personne physique ou morale, permettant à celle-ci le preneur d'exercer dans les lieux avec l'accord de celle-là, le bailleur, une activité commerciale, industrielle, artisanale ou toute autre activité professionnelle » ;
Le communicateur a fait remarquer en saluant la réforme que le caractère commercial du bail qui était fonction du nombre d'habitant de la localité où se trouve l'immeuble exploité, n'est plus de mise dans le nouvel Acte Uniforme sur le Droit Commercial Général ;
Poursuivant, le communicateur a rappelé les obligations du bailleur régies par les articles 105 à 111 et l'Acte Uniforme, celles incombant au preneur aux termes des articles 112 à 115 de l'Acte Uniforme, les règles régissant la cession et la sous-location dans le respect des dispositions des articles 118 à 112 de l'Acte Uniforme, les conditions et formes du renouvellement régies par les articles 123 et suivants de l'Acte Uniforme et enfin les règles régissant la résiliation du bail aux termes de l'article de l'Acte Uniforme ;
A la suite du Docteur Gaston KENFACK DOUAJNI, Maître François ANDRIEUX a fait son développement en commençant par faire remarquer qu'en France, la terminologie de ''bail commercial'' continue d'être en vigueur côte à côte avec celle de bail professionnel. Cependant la dernière évolution législative permet au bénéficiaire du bail professionnel de passer sous le régime du bail commercial.
En outre Maître Françoise ANDRIEUX a précisé que le bail commercial est régi en France par les dispositions d'un Décret de 1953 aux termes duquel la durée du bail commercial initial est au moins de neuf ans et celle des contrats renouvelés d'au moins de 3 ans ;
Les obligations du bailleur et du preneur ont été abordées par la communicatrice qui a d'abord rappelé les conditions de formation du bail ;
La sous-location ne peut être faite qu'après information du bailleur qui doit de plus prendre une part effective dans la conclusion du contrat de sous-location.
Il en est de même dans le cas de la cession du bail où le preneur cédant doit en outre informé ses créanciers de cet acte de disposition qui pourrait porter atteinte à leurs droits ;
La communicatrice a continué ses propos en parlant des mécanismes de nouvellement du bail et la fin du contrat de bail.
Elle a notamment fait remarquer que l'évolution législative en cette matière a consacré une protection très accrue du preneur au détriment du bailleur obligé par exemple, de notifier à son locataire les raisons d'un refus de renouvellement du bail alors que ce dernier n'est pas soumis à la même obligation au cas où il déciderait de ne plus continuer le bail ;
Après l'intervention de Maître Françoise ANDRIEUX, une liste a été ouverte pour enregistrer les préoccupations des participants. Celles-ci vont de l'importance du contrat écrit pour le recouvrement des loyers, au problème de l'indemnité d'éviction, en passant par l'impact de l'amélioration des lieux loués sur le loyer, l'impact de la destruction partielle de l'immeuble loué ou celui des réparations de longue durée sur le bail et les difficultés qui peuvent naître de l'amélioration des lieux par le preneur ;
La deuxième communication de cette première journée, porte sur le thème : ‘'le contentieux du bail à usage professionnel''.
Il a été développé par le docteur KENFACK DOUAJNI, dans ses aspects concernant l'OHADA et par Maître Mathieu CHARDON dans ses aspects relatifs au droit Français , Maître Claudine MOUGNI ayant fait office de modératrice ;
Dans ses propos liminaires, le Docteur KENFACK DOUAJNI a annoncé qu'il y a une kyrielle de contentieux pouvant naître de l'exécution du bail à usage professionnel à l'instar du non respect par les parties de leurs obligations, la sous location, la cession, le décès de l'une des parties au contrat et le droit au renouvellement du bail. Il a insisté que cette liste n'est pas exhaustive et que d'autres cas de contentieux peuvent naître en cours du bail ;
Ainsi relativement au non-respect des obligations contractuelles, on peut citer le non paiement des loyers qui peut induire la mise en œuvre de la clause résolutoire après une mise en demeure enjoignant au preneur de respecter ses obligations contractuelles dans un délai d'un mois à défaut de quoi la juridiction compétente pourrait être saisie pour prononcer la résiliation du bail ;
Les contentieux relatifs au bail à usage professionnel impliquent le problème de la compétence du juge saisi qui est déterminée par le droit interne de chaque Etat. C'est la quintessence de l'avis émis le 26 Février 2004 par la CCJA saisie par un juge sénégalais. Cette position de la CCJA a été confirmée par un arrêt récent de cette juridiction communautaire rendu suite à la saisine par le juge Béninois ;
A la suite de ce communicateur, Maître Mathieu CHARDON a pris la parole et à d'abord dit son admiration pour cette organisation communautaire qu'est l'OHADA qui réunit des Etats ayant en commun la langue française et qui se sont entendus pour harmoniser leur droit des affaires. Ce qui constitue une grande avancée par rapport à l'Europe.
Ensuite, il a développé au regard du droit Français le contentieux du bail né du congé et du non-paiement des loyers sans occulter le problème posé par le renouvellement du bail ;
Des interventions ont été par la suite enregistrées concernant notamment le contentieux posé par le décès du locataire, l'effet du préavis sur le paiement des loyers, les précautions à prendre par le preneur avant et après l'amélioration des lieux loués, le renouvellement du bail ;
Après la pause déjeunée, un cas pratique a été étudié par les participants et est relatif aux problèmes posé par le décès du bailleur. Le preneur peut-il s'abstenir de payer les loyers en cas d'inorganisation de la succession du défunt bailleur ? La veuve du bailleur peut-elle en dehors de l'organisation de la succession faire mettre fin au bail consenti par son époux ?
Au premier problème principal il a été proposé la consignation des loyers par le preneur au profit de la future succession de son cocontractant défunt ;
En ce qui concerne la veuve, elle n'est pas autorisée à entreprendre quelque action que ce soit, visant à mettre fin au contrat ;
Voilà chers séminaristes et confrères, la quintessence des travaux de la journée du jeudi 23 février 2012 que je soumets à votre attention.
Je vous remercie.
Le Rapporteur,
Maître Charles COOVI
Huissier de Justice
Rapport de la journée du 24 février 2012
Par Maître Jérôme Gérard OKEMBA-NGABONDO (CONGO)
La deuxième journée du séminaire international des huissiers de justice s'est poursuivie ce 24 février 2012 dans salle de conférence de l'hôtel Sun Beach de Cotonou. Elle a débuté par la lecture puis l'adoption avec amendement du rapport de la journée du 23 février 2012 consacré aux communications relatives au bail à usage professionnel et au contentieux y afférent. Ce rapport a été présenté par Maître COOVI Charles, huissier de justice à Cotonou(BENIN).
Puis, les communications du jour relatives au bail à usage d'habitation ont été assurées tour à tour par le Docteur Gaston KENFACK DOUAJNI (CAMEROUN) et par Maître Anne KERESIT, Maître Claudine MOUGNY (BENIN) ayant assuré la modération desdites communications.
Dans son intervention, le Docteur Gaston KENFACK DOUAJNI a relevé dans un premier temps que le bail à usage d'habitation rejoint le bail à usage professionnel en un point : tous deux portent sur le louage des choses. En revanche, le bail à usage d'habitation se distingue du bail à usage professionnel en ce que ce dernier touche au droit de propriété. Ce qui n'est pas le cas du bail à usage d'habitation qui reste largement régi par les dispositions du code civil induisant des obligations tant du côté du bailleur que celui du preneur.
S'agissant du bailleur, celui-ci doit délivrer le local d'habitation en bon état, procéder à toutes les réparations nécessaires autres que les réparations locatives. S'il ne satisfait pas à cette obligation et en cas d'urgence le preneur peut avancer les frais pour effectuer lesdites réparations. Il doit donner au locataire un immeuble dont celui-ci peut jouir effectivement c'est-à-dire, garantir le preneur contre les vices cachés qui empêchent le locataire de jouir de la chose louée, sauf à démontrer que celui-ci était conscient des vices sus évoqués. Le bailleur doit enfin garantir le preneur contre tout trouble de fait.
Quant au preneur, deux obligations principales pèsent sur lui :
- Il doit user de la chose louée en bon père de famille et respecter la destination prévue au contrat.
- Il doit aussi payer le prix en termes convenus car celui-ci constitue la contrepartie logique et fondamentale du contrat.
Pour ce faire, il est sage pour le bailleur de dresser un état des lieux à l'entrée du preneur pour s'assurer du bon état des locaux à la fin du contrat.
Un accent particulier a été mis sur les obligations spéciales édictées par les articles 1752 à 1762 du code civil. Il ressort de ces obligations que :
- Le locataire doit suffisamment garnir en meubles, l'immeuble loué pour garantir le paiement des loyers. C'est l'explication en Afrique, de la caution exigée au preneur par le bailleur.
La saisie gagerie a été abordée par le Docteur KENFACK DOUAJNI qui, d'entrée de jeu, a souligné que cette saisie avait bel et bien été réglementée par les législations nationales avant l'avènement de l'Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiés de recouvrement et des voies d'exécution. Même si ledit acte uniforme n'a pas spécialement réglementé la saisie gagerie, celle-ci intègre la saisie conservatoire des biens meubles corporels dont les règles ont été organisées par l'acte uniforme dont s'agit.
Ce qui est primordial à retenir dans la saisie conservatoire des biens meubles corporels c'est que l'acte uniforme vise l'indisponibilité et non la dépossession des biens .Le débiteur conserve l'usage et la garde des biens saisis. Les enlèvements de biens sont donc proscrits. Cependant, il peut y avoir des exceptions :
- Lorsque les deux parties s'accordent à désigner un séquestre.
- Ou lorsque le créancier demande au juge l'autorisation d'enlever les biens et de les confier à un séquestre, soit avant, soit après les opérations de saisie.
La philosophie du droit OHADA est de permettre au créancier de rentrer en possession de son dû tout en évitant de spolier le débiteur.
Le bail à usage d'habitation peut être écrit ou verbal.
Après la communication du Docteur Gaston KENFACK DOUAJNI, plusieurs interventions se sont focalisées sur la saisie gagerie dont le point d'achoppement a été la conservation des biens saisie par le débiteur.
Face à ces multiples interventions, le Docteur Gaston KENFACK DOUAJNI a affirmé que l'acte uniforme a prévu une porte de sortie qui est l'article 103. Il a invité les huissiers de justice à bien lire et bien exploiter ledit article. Il a en outre suggéré aux Huissiers de justice de faire les propositions car l'acte uniforme sur les voies d'exécution est en cours de révision.
Par la suite, Maître Anne KERESIT a présenté le cas du bail à usage d'habitation en France. Contrairement au bail à usage commercial dans où prédomine l'idée de liberté, le bail d'habitation bénéficie d'un encadrement législatif. En matière d'habitation et de local affecté au logement, il ya beaucoup de statuts spécifiques protecteurs qui réduisent les dispositions du code civil en une peau de chagrin.
Le socle du contrat de bail à usage d'habitation est constitué en France par la loi du 06 juillet 1989 et tous les textes subséquents. Il y a très peu de place pour la liberté contractuelle car il ya une instauration d'un véritable droit au logement. Parmi les éléments du droit au logement émerge la notion de « logement décent » dont les contours embrassent aussi bien l'électricité, la plomberie que la surface habitable.
Il y a une spécificité d'application du bail à usage d'habitation. Celui-ci a un caractère d'ordre public et offre une protection à la partie la plus faible du contrat. Les clauses contractuelles contraires ou illicites sont réputées non écrites. S'agissant de la forme du bail à usage d'habitation, l'écrit est obligatoire, soit par acte authentique, soit par acte sous seing privé.
Le législateur n'a pas prévu de sanction pour le bail verbal mais plutôt la mise en conformité judiciaire ou par voie d'astreinte. La mise en demeure doit être faite par le locataire. A défaut de réponse du bailleur dans les deux mois, le locataire peut saisir la commission départementale de conciliation.
Quant à la durée du bail d'habitation, elle est de trois ans si le bailleur est une société civile immobilière de famille ou une personne physique. Elle est de six ans lorsque le bailleur est une personne morale.il y a cependant une exception où la durée peut être inférieure à trois ans mais supérieure à un an lorsqu'un événement précis justifie cette durée inférieure. Il peut s'agir par exemple d'un événement familial.
Pour donner congé, le bailleur doit prévenir le locataire deux mois avant le terme de l'événement sinon le bail est de trois ans. On peut reculer le terme une seule fois.
A défaut de congé, le contrat se poursuit par tacite reconduction. Si l'état des lieux n'a pas été établi à l'entrée, le locataire n'est pas tenu de procéder aux réparations locatives.
Un dépôt de garantie est prévu mais il ne peut être supérieur à un mois de loyer. Toute clause contraire est réputée non écrite et le dépôt de garantie est remboursé dans les deux mois de la restitution des clés.
Le prix du bail est librement fixé par les parties. Dans l'hypothèse du renouvellement, le bailleur doit, six mois à avant l'échéance, proposer un renouvellement avec le nouveau loyer. En cas de silence, le locataire est réputé avoir refusé. Il peut y avoir saisine de la commission départementale de conciliation, sinon du juge.
S'agissant du contentieux du bail à usage d'habitation, les parties peuvent insérer au contrat une clause résolutoire dont l'inobservation est une cause de résiliation du bail.
La résolution judiciaire peut intervenir en cas d'inexécution de ses obligations par le locataire. Mais, même dans ce cas, le juge garde une liberté d'appréciation. D'une façon générale, les décisions judiciaires rendues en matière des baux d'habitation en France sont comme la tour de Pise, elles ne penchent que d'un côté, celui du locataire.
Maître Anne KERESIT a clos son intervention par le congé qui, peut être donné, aussi bien par le locataire que par le bailleur.
Le locataire peut donner congé à tout moment sauf à respecter un préavis de trois mois lequel peut être réduit à un mois pour raison de mobilité professionnelle.
Alors que pour donner au preneur un congé, le bailleur doit attendre le terme du contrat et notifier un préavis de trois mois. Il doit en outre justifier son congé par :
- La reprise des lieux pour son propre compte
- La reprise des lieux pour y installer sa famille
- La vente de l'immeuble
- Les motifs graves et répétés à la charge du preneur
Puis est intervenue une pause-café à l'issue de laquelle l'auditoire s'est éclaté en quatre groupes auxquels ont été soumis l'examen d'un cas pratique mettant en exergue une question principale : le changement de la destination des lieux par le locataire c'est-à-dire l'emploi de la chose louée à un usage autre que celui auquel il était destiné.
Chaque groupe est passé tour à tour pour donner son approche de solution. La synthèse des réponses des groupes faite par Maître Françoise ANDRIEUX (FRANCE) fait apparaître deux approches de solution :
- La première est juridique et restrictive
- Tandis que la deuxième est économique et extensive
A l'issue de cette synthèse est intervenue la pause déjeuner.
La reprise des travaux a été marquée par la quatrième communication relative aux éléments de pratique professionnelle. Elle a été présentée par le tandem Jean Michel ROUZAUD(France)-Alphonse KIBAKALA (CONGO) sous la modération de MOUSSA DANKOMA (NIGER).
Prenant la parole en premier, Maître MOUSSA DANKOMA a souligné que la tenue des formations de l'UFOHJA est aujourd'hui à sa dixième année. Pour ce faire, il a rendu un vibrant hommage à Jacques ISNARD, ancien président de l'Union Internationale des huissiers de Justice, qui a été le pionnier de ces sessions de formations.
Ensuite, Maître Alphonse KIBAKALA a exposé sur la déontologie. Selon l'orateur, la déontologie devrait être à la base de la pratique de tout huissier de Justice. Le fondement de la déontologie repose sur les grands principes qui sont assortis de sanctions.
La déontologie se définit comme l'ensemble des règles qui s'imposent aux membres qui exercent une profession publique ou privée. Ces règles sont élaborées par l'Ordre. Il s'agit de : la courtoisie envers les confrères, le respect de la hiérarchie, l'interdiction de débaucher la clientèle des confrères, la bonne tenue, le respect du secret professionnel, etc.
L'inobservation de ces règles et principes généraux peut conduire aux différentes sanctions prévues par les lois organisant la profession d'huissier de justice dans chaque pays. Ces sanctions peuvent être professionnelles ou pénales.
Quant à Maître Jean Michel ROUZAUD, il s'est appesanti sur la différence existant entre la déontologie, la morale et l'éthique. L'Huissier de Justice doit être à la recherche permanente de la déontologie qui fait partie intégrante de ses missions.
La déontologie est la façon de faire, de se demander si ce que l'on fait est humainement possible. Les règles de déontologie sont importantes pour la légitimité et la crédibilité de la profession. Avant même de prêter son serment, on doit pouvoir justifier qu'on remplit les conditions nécessaires pour devenir huissier de justice.
Tout fait contraire à l'honneur, à la probité donne droit à sanction disciplinaire. L'Huissier de Justice doit d'abord regarder l'intérêt général avant de voir l'intérêt économique.
Le ministère forcé doit être conforme aux règles morales et aux règles déontologiques. Autrement dit, s'interroger sur la licéité de la mission. L'huissier de Justice doit refuser le mandat si celui-ci est illicite.
L'établissement d'un constat implique des limites spatiales tenant à la propriété privée et des limites temporelles. Le constatant doit se limiter aux constatations de fait sans tirer des conclusions techniques ou abusives.
L'Huissier de justice n'a pas la compétence juridique pour enquêter. Il doit se débarrasser de ses contingences personnelles pour intervenir dans le cadre général du jugement qui est rendu.
La délicatesse dépend du message que les anciens doivent transmettre aux nouveaux. La probité, l'honneur et la délicatesse sont des valeurs cumulatives. L'huissier de justice doit toujours rester dans la norme.
L'indépendance de l'Huissier de justice est souvent mise à mal par les pratiques des clients institutionnels. Mais l'Huissier de Justice doit rester inflexible face auxdites pratiques. L'Huissier de justice va tendre vers l'efficacité et non faire n'importe quoi pour être efficace.
Il ne faut pas confondre confraternité et corporatisme.
La formation est l'un des piliers les plus importants de la profession. La session de formation développe la compétence globale au bénéfice de toute la profession.
RAPPORT GENERAL DU SEMINAIRE INTERNATIONAL DES HUISSIERS DE JUSTICE TENU A COTONOU, REPUBLIQUE DU BENIN , DU 23 AU 24 FVRIER 2012, SOUS LE THEME : « LE CONTRAT DE LOCATION ET SON EXECUTION »
Présenté par Maître Joachim MITOLO (CONGO)
Dans le cadre du fonctionnement régulier de l'Union Internationale des Huissiers de Justice et Officiers Judiciaires, notamment dans sa vocation de formation continue des Huissiers de Justice en Afrique, avec l'appui de l'école nationale de procédure de Paris, s'est tenu, à Cotonou, en République du Benin, dans la salle de conférence sise au cinquième étage de l'Hôtel SUN BEACH, les 23 et 24 février 2012, le séminaire de formation sur le contrat de location et son exécution.
Ce séminaire qui entre dans les activités de l'Unité de Formation des Huissiers de Justice Africains, en sigle UFO.J.A., a connu la participation de neuf pays africains, notamment du Congo, du Niger, du Cameroun, de la Côte d'Ivoire, du Tchad, du Togo, du Burkina Faso, du Sénégal, du Gabon et, bien naturellement, du Bénin, pays organisateur.
Ce séminaire a regroupé non seulement des Huissiers de Justice, mais également d'autres praticiens du droit, en l'occurrence, les magistrats, les avocats, et les juristes d'entreprise.
L'ouverture du séminaire a connu trois allocutions, celle de Maître LAGUIDE WAKILI, Président de la Chambre Nationale des Huissiers de Justice du Benin, celle de Maître Léo NETTHEN, Président de l'Union Internationale des Huissiers de Justice et Officiers Judiciaires et celle de Madame Marie-Elise GBEDO, Ministre de la Justice, de la Législation et des Droits Humains, Porte-parole du Gouvernement, Président du Conseil des Ministres de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique des Droits des Affaires.
Dans son allocution, le Président de la Chambre Nationale des Huissiers de Justice du Benin a souhaité la bienvenue à toutes les délégations et à tous les participants ainsi qu'au Gouvernement de la République du Benin.
Poursuivant son propos, il a fait un état des lieux de la profession d'Huissier de Justice en Afrique depuis 1996, aboutissant à la conclusion selon laquelle cette profession connait les mêmes problèmes dans tous les pays d'Afrique.
Ce faisant, il a constaté qu'il y a des perspectives d'avenir d'une profession qui va de mieux en mieux.
Il a enfin évoqué la question centrale du séminaire, LE CONTRAT DE LOCATION ET SON EXECUTION, en mettant en relief le rôle de la justice dans la société et l'image de l'Huissier de Justice.
Clôturant son propos, il a souligné l'importance des échanges des connaissances dans ce brassage d'acteurs de justice.
Prenant la parole à son tour pour le mot de circonstance, le Président de l'Union Internationale des Huissiers de Justice et Officiers Judiciaires, après s'être réjouit de son arrivée au Benin, a mis un accent particulier sur la sécurité juridique et le respect des droits de chacun.
Cette sécurité juridique passe nécessairement par trois niveaux : l'organisation judiciaire de l'Etat, les lois de l'Etat et l'aptitude de l'Etat à garantir l'exécution des décisions de justice.
Après avoir évoqué l'importance de la profession d'Huissier de Justice avec toute son essence, il est revenu sur la nécessité de la formation de l'Huissier de Justice, initiale et continue, avant d'aborder les perspectives et le congrès de l'Union Internationale des Huissiers de Justice et Officiers Judiciaires qui aura lieu à CAP TOWN, en Afrique du Sud, au mois de Mai prochain.
Enfin, Madame la Ministre de la Justice a pris la parole pour son mot d'ouverture.
Dans son allocution au cours de laquelle elle a d'abord souhaité la bienvenue à tous les participants au nom du Docteur Boni YAYI, Président de la République du Benin, elle a exprimé un vif intérêt sur le thème retenu tout en soulignant que le séminaire se tenait à la suite de plusieurs événements heureux pour le Benin, en 2012.
Poursuivant son propos avec aisance, elle a élagué le conflit souvent récurent entre les lois et les valeurs traditionnelles des citoyens tout en indiquant que c'est dans ce contexte entre autres, que le ministère d'Huissier de Justice est important mais difficile.
Avant de déclarer ouvert le séminaire international, Madame la Ministre s'est félicitée de la diversité des participants et de leurs qualités.
C'est après cette impression visiblement objectiviste qu'elle déclaré ouvert le séminaire International de formation des Huissiers de Justice sur le CONTRAT DE LOCATION ET SON EXECUTION.
A la suite de ce mot de clôture, il a été remis à Madame la Ministre par Monsieur le Président de l'Union Internationale des Huissiers de Justice et Officiers Judiciaires, une médaille en or dans un coffret ouvert à la remise et deux documents.
Après ces différentes allocutions, et après le départ de Madame la Ministre, il a été offert une pause-café avant de commencer les travaux relatifs au séminaire.
Ces travaux ont commencé par la première communication, portant sur le bail à usage professionnel et son exécution, faite par le Docteur Gaston KENFACK DOUAJNI, expert en droit OHADA, Maître Françoise ANDRIEUX, Huissier de Justice en France, avec la modération de Maître Hortense BANKOLE de SOUZA, Huissier de Justice au Benin.
Dans sa communication, le Docteur Gaston KENFACK DOUAJNI a fait état de l'évolution du droit OHADA en la matière, notamment les modifications apportées dans l'acte uniforme sur le droit commercial général.
Il a énuméré les éléments constitutifs du bail avec les obligations du bailleur et celle du preneur.
Son exposé s'est également appesanti sur la suspension du contrat de bail, la fixation du prix, la sous-location, la cession partielle ou totale du bail et la résiliation.
Maître Françoise ANDRIEUX a fait sa communication sur l'expérience française qui parle du bail commercial, de sorte qu'il est apparu une étude comparative enrichissant les débats.
A la suite de ces deux exposés, s'est ouverte la discussion entre les participants, avec des questions à la clé.
Après avoir épuisé les questions et les débats, les participants ont abordé la deuxième communication qui portait sur Le contentieux du bail à usage professionnel.
Cette communication a été faite par le Docteur Gaston KENFACK DOUAJNI avec la participation de Maître Mathieu CHARDON, Huissier de Justice en France, et la modération de Maître Claudine MOUGNI, Huissier de Justice au Benin.
Là également, dans un brillant exposé, le Docteur Gaston KENFACK DOUAJNI a indiqué de façon non limitative les cas de contentieux sur l'exécution du bail en mettant en relief le Juge compétent pour connaître de ces contentieux en application de l'article 133 alinéa 3 de l'acte uniforme sur le droit commercial général.
De même, il a indiqué dans quelles conditions la clause résolutoire doit être mise en œuvre.
Maître Mathieu CHARDON s'est appesanti sur l'expérience française. Dans son exposé, il a évoqué la mise en mouvement de la clause résolutoire et le juge compétent pour connaître du contentieux.
La différence essentielle est liée au fait que la procédure de réalisation de la clause résolutoire peut être suspendue si le preneur venait à payer les loyers demeurés impayés et prenait des engagements sérieux relatifs au respect des clauses du contrat de location.
Cette communication a eu un écho particulier en ce que les intervenants ont été très nombreux.
C'est ainsi que s'est engagé un débat au centre de plusieurs questions posées qui ont reçu leurs réponses.
A la suite de ces débats, et après le déjeuner, un cas pratique a été soumis aux participants.
Ce cas pratique qui portait sur la pluralité et la diversité des ayants droit au contrat de bail a suscité un vif intérêt. A cet effet, plusieurs solutions aux questions soulevées dans ledit cas ont été proposées, jusqu'à la résolution définitive, faisant appel au rôle de conseil de l'Huissier de Justice et à son professionnalisme.
Cette journée qui s'est terminée aux environs de dix-sept heures trente minutes a fait l'objet d'un rapport rédigé par Maître Charles BOUVI, Huissier de Justice au Benin, lequel rapport a été présenté et adopté avec un amendement le 24 février 2012.
Les participants ont poursuivi les travaux ce vendredi 24 février 2012 dans la même salle, après avoir désigné Maître Jérôme Gérard OKEMBA NGABONDO, Huissier de Justice au Congo, en qualité de rapporteur.
Après un bref rappel de la journée du 23 février 2012 sur les termes ‘'à bref délai'' et ‘'le juge compétent'', le Docteur Gaston KENFACK DOUAJNI a demandé aux magistrats qui participaient aux travaux d'apporter leur contribution.
Les participants ont ainsi suivi l'intervention de deux magistrats qui ont évoqué la question en nuançant les différents cas où il faut saisir le juge du fond et ceux pour lesquels il convient de saisir le juge des référés, tout en mettant un accent particulier sur le contenu de l'acte de saisine du juge, notamment l'acte d'Huissier de Justice.
Les participants ont par la suite suivi la troisième communication intitulée ‘'Le bail à usage d'habitation : contentieux et exécution''.
Cette communication a été faite par le Docteur Gaston KENFACK DOUAJNI avec la participation de Maître Anne KERISIT, Huissier de Justice en France, et la modération de Maître Claudine MOUGNI, Huissier de Justice au Benin.
Le Docteur Gaston KENFACK DOUAJNI a édifié les participants sur les conditions du contrat de bail à usage d'habitation en précisant les différences qu'il comporte avec le bail à usage professionnel.
En effet, il est apparu clairement que la protection du preneur, contrairement au bail à usage professionnel, est un des éléments essentiels de ce bail.
De même, si le bail à usage professionnel est précisé dans l'acte uniforme sur le droit commercial général, le bail à usage d'habitation tire particulièrement son essence des dispositions du code civil qui sont d'ordre public. C'est ici que le communicateur a énuméré les articles 1752 à 1762 du code civil. Dans cette optique il a évoqué les obligations du bailleur et du preneur en abordant également la notion de saisie gagerie.
Après son exposé, Maître Anne KERISIT qui a brillamment présenté le bail à usage d'habitation tel qu'il existe en droit français, a apporté des précisions sur le contenu dudit bail. Aussi, la liberté de contracter est encadrée par des dispositions légales d'ordre public ; c'est le cas du caractère écrit du bail qui est une obligation prévue par le législateur, même si ce dernier n'a pas prévu de sanction pour les contrats verbaux.
Après ces deux exposés, les participants ont été répartis en quatre ateliers pour examiner un cas pratique sur le changement de destination des lieux loués à usage d'habitation.
Avant d'examiner ce cas pratique, les participants ont pris un déjeuner.
Poursuivant le séminaire, la restitution des travaux en ateliers qui a suscité de vifs débats, s'est fait à tour de rôle avec des réponses apportées qui ont fait l'objet d'une précieuse synthèse par Maître Françoise ANDRIEUX, aboutissant à deux approches dont l'une est juridique et restrictive et l'autre, économique et extensive.
Enfin, les participants ont suivi la quatrième communication intitulée ‘'Eléments de pratique professionnelle'' dans laquelle il a été évoqué la déontologie, la gestion des clients, la gestion des procédures, les règles en matière de constat, d'interpellation et autres.
Cette communication a été faite par Maître Alphonse KIBAKALA, Huissier de Justice en République du Congo et conseiller spécial du Président de l'Union Internationale des Huissiers de Justice et Officiers Judiciaires, puis de Maître Jean-Michel ROUZAUD, expert, Huissier de Justice en France, Président de l'école nationale de procédure de Paris, en sigle E.N.P., avec la modération de Maître MOUSSA Dan KOMA, Huissier de Justice, Président de la Chambre Nationale des Huissiers de Justice du Niger.
Prenant la parole, Maître Alphonse KIBAKALA a fait un large écho de la déontologie professionnelle, avec à la clé, le secret professionnel, l'éthique personnelle de l'Huissier de Justice, le respect des règles de la profession, la bonne collaboration avec les autres professionnels du droit. A cet effet, il a fait état des sanctions disciplinaires. Il a également évoqué la nécessité d'une bonne tenue de l'Etude de l'Huissier de Justice.
A son tour, Maître Jean-Michel ROUZAUD, complétant l'exposé de Maître Alphonse KIBAKALA, a fait état de la tenue de l'Huissier de Justice, l'obligation pour ce dernier d'observer la probité, l'indépendance et la perfection. Il a également fait la nuance entre le constat et l'enquête, précisant que l'Huissier de Justice ne peut se livrer à l'enquête qui est du ressort du juge.
Suite à ces précieux et brillants exposés, les participants ont posé plusieurs questions et pour lesquelles des réponses ont été apportées de façon efficiente.
De tout ce qui a été exposé et des débats du 24 février 2012, un rapport a été adopté sans amendement.
En marge du séminaire, les participants ont été informés de ce que la République du TOGO a été retenue pour organiser les troisièmes rencontres Europe Afrique pour l'année 2013.
Le séminaire s'est achevé par une note de pleine satisfaction des participants.
Fait à Cotonou, le 24 février 2012
Le Rapporteur Général,
Me Joachim MITOLO