Notre site comporte tant d'informations sur notre 19e congrès qu'il serait superflu d'en relater plus encore son déroulement.
Cependant, s'il reste, après coup, un point qui mérite d'être abordé c'est bien celui des perspectives que nous offre l'après-Washington.
Mais avant tout nous voudrions saluer la présence massive dans la capitale américaine des représentants du continent africain. Acteurs remarqués durant les travaux et chantres d'un métier, le nôtre, que d'aucuns considèrent encore comme devant rester figés aux seules activités de la signification et de l'exécution, ils ont surpris par leur clairvoyance et leur analyse progressiste.
Autres enseignements : la puissante poussée des huissiers de justice à statut libéral de l'Europe centrale et orientale présents dans de nombreuses commissions contrastant en cela avec le naufrage de nos collègues autrichiens et italiens officiellement absents de nos débats, démontrant ainsi combien, exceptés quelques rares cas, la rupture paraît inéluctable entre huissiers de justice et agents d'exécution à statut public.
Enfin, autre aspect positif : l'amorce d'initiatives prometteuses sur le territoire américain, d'abord au travers des contacts établis avec la Banque Mondiale grâce à l'intervention française, et ensuite avec le rapprochement envers différentes institutions ayant vocation à côtoyer notre corporation.
Le congrès, cela est son rôle, a tracé le programme qui va dicter, pour les prochaines années, l'action du nouveau bureau.
Toute démarche prospective devra veiller à intégrer, d'une part, les mutations substantielles qui se profilent au sein de notre profession et, d'autre part, à anticiper sur l'évolution des principes juridiques qui la gouverne, et qui restent soumis à la forte imprégnation de la mondialisation.
S'agissant des concepts juridiques, nul ne saurait contester que les grands principes civilistes d'essence romano-germaniques, qui depuis le 19e siècle gouvernaient une grande partie de la planète, se sont estompés au profit d'un droit d'inspiration anglo-saxon privilégiant l'émergence de la nature contractuelle.
A l'évidence, aujourd'hui, les tentatives ou projets d'aménagement de structures juridiques universelles s'articulent autour d'un triple mécanisme visant à instaurer :
- un droit puisant sa substance dans la notion de contrat
- un système judiciaire articulé autour d'un mode alternatif de règlement des litiges, en privilégiant l'arbitrage
- un arsenal de dispositifs en faveur de mesures d'exécution harmonisées.
De cette architecture s'évince l'idée d'un droit substantiel qui serait dominé par les valeurs contractuelles, dont les conflits seraient réglés par le recours à l'arbitrage et la sanction appliquée en contemplation d'instruments relevant d'un droit de l'exécution harmonisé.
Sur ce dernier point, objet d'une affection particulière compréhensive pour nous huissiers de justice, il est aisé de mesurer, malgré un parcours chaotique, combien les progrès sont constants.
Les travaux du congrès l'ont démontré lors des propositions de synthèse en reprenant l'étude de l'ALI-Unidroit sur les « principes de procédure civile transnationale »,
La forte sensibilité affichée par ailleurs par les congressistes sur les thèmes portant sur le développement de nos activités a démontré l'importance des enjeux économiques et les préoccupations qu'ils suscitent.
Le mythe de l'huissier de justice lié au rôle réducteur d'agent d'exécution ou de signification est dépassé. D'ailleurs chacun a pu se rendre compte du déclin de ces deux pôles d'activité.
L'heure est désormais à la pluridisciplinarité. Partout l'huissier de justice esquisse un nouveau profil. En Europe, mais aussi en Afrique - voire sur le continent américain et en Thaïlande - l'huissier de justice sera un juriste de haut niveau, professionnel libéral, indépendant et responsable. Reconnu comme vecteur de sécurité juridique, considéré comme un maillon de la chaîne économique, plébiscité dans la lutte contre la corruption et rangé parmi les éléments essentiels à l'existence d'un état de droit, l'huissier de justice bientôt organisé en réseaux, constituera un référence majeure dans la mise en place de tout système judiciaire national ou international.
Il est regrettable que quelques gouvernements d'Etats - particulièrement d'Europe- encore reclus dans leur souveraineté nationale, mal informés et passéistes songent, sous des prétextes fallacieux, à maintenir un corps d'huissier de justice volontairement affaibli et aux compétences limitées aux seules fins d'assurer un contrôle judiciaire et politique d'outre temps, quitte à nuire au bon fonctionnement de leur propre service public de la justice ! Pire... Il est invraisemblable que de tels dirigeants puissent encore afficher une pareille posture dans les enceintes internationales en percevant des échos favorables.
Le bureau de l'UIHJ a établi un plan en 12 points s'inscrivant chacun dans un ensemble destiné à promouvoir un huissier de justice nanti de nouvelles prérogatives qui viendront élargir la palette de ses activités dans des domaines aussi variés que ceux de conseil, du recouvrement des créances, de la plénitude de l'exécution ou encore de fonctions directement rattachée telles les actes privés authentifiés, les séquestres, la médiation post judiciaire, etc.
Les consultations sont lancées et chaque huissier de justice intéressé pourra s'associer aux réflexions.
Notre dernier éditorial préfigurait déjà ce mouvement.
Désormais l'ordre de marche est donné.
A suivre...