Dix millions d'apostilles par an
L'apostille est un procédé qui permet à un document authentique émis dans un Etat d'être reconnu et utilisé dans un autre Etat, sans avoir besoin d'une procédure de reconnaissance compliquée et coûteuse. La convention du 5 octobre 1961 supprimant l'exigence de légalisation des actes publics étrangers, dite « convention apostille » est l'œuvre de la Conférence de La Haye de droit international privé. Elle est actuellement utilisée par quatre-vingt-dix-neuf Etats. Il s'agit de la plus utilisée parmi les trente-neuf conventions de la Conférence de La Haye de droit international privé.
La Conférence de La Haye a initié en 2006 un grand mouvement afin de permettre de faire entrer l'apostille dans l'ère numérique. Le projet e-Apostille (e-APP, pour e-Apostille Pilot Program, programme pilote d'apostilles électroniques) a pour objet de coordonner les actions des Etats afin de développer et d'harmoniser l'apostille électronique. Il doit s'étendre sur une durée de dix-huit mois. L'Espagne est partenaire du projet. La Finlande, la France et la République tchèque en sont partenaires associées.
C'est dans ce cadre que le présent séminaire régional s'est tenu dans les locaux prestigieux du Palais des Etats, au cœur d'Helsinki, accueillant une cinquantaine de participants venus de dix-neuf pays du monde entier. L'UIHJ était représentée par son premier secrétaire, Mathieu Chardon. On a noté également la présence des huissiers de justice français, très intéressés par le projet, et représentés par Jean-François Bauvin, vice-président de la Chambre nationale des huissiers de justice de France, et par Patrick Safar, secrétaire adjoint.
La réunion était présidée par Antii Leinonen, directeur des Affaires législatives du ministère de la Justice de Finlande. La Conférence de La Haye était représentée par son premier secrétaire, Christophe Bernasconi.
Antii Leinonen a ouvert le séminaire en indiquant que, malgré le froid (environ -15°C), la participation était plus forte que prévue, démontrant tout l'intérêt pour l'apostille et pour son futur. Il a souhaité à chacun des travaux fructueux en précisant que, comme c'est le cas pour les réunions de la Conférence de La Haye, des recommandations seraient faites à l'issue des travaux. José de la Mata Amaya, directeur général de la Modernisation de l'administration de la justice (ministère de la Justice d'Espagne), a également souhaité la bienvenue aux participants. Il a indiqué que le nouveau système d'e-Apostille, bientôt en vigueur en Espagne, serait présenté pendant la journée.
Christophe Bernasconi, 1er secrétaire de la Conférence de La Haye, a ensuite confié combien il était heureux de constater tout l'intérêt que présentent l'apostille et le projet e-APP, comme en atteste la présence de nombreux pays. Puis le premier secrétaire de la Conférence de La Haye a remercié les autorités finlandaises ainsi que l'Espagne pour leur investissement dans le projet. « Nous allons célébrer le 50e anniversaire de la convention apostille. Les cinquante prochaines années seront sûrement placées sous le signe de l'e-Apostille espagnole » a-t-il indiqué. M. Bernasconi a rappelé les grands principes de l'apostille. Avec ce procédé, l'autorité compétente délivre directement l'apostille en une seule étape. On évite donc tout un processus long, coûteux, et finalement inutile, pour permettre à un document officiel d'un Etat à être reconnu et utilisé dans un autre Etat. La convention apostille se développe rapidement. Depuis 2000, 30% de nouveaux pays l'ont ratifiée. D'ici quelques semaines, le centième pays devrait la ratifier. Selon les estimations de la Conférence de La Haye, environ dix millions d'apostilles sont émises chaque année dans le monde. Au Venezuela ou en Colombie par exemple, 6000 apostilles sont établies quotidiennement dans chaque Etat. En France, environ 400 000 apostilles sont délivrées annuellement. Le coût moyen d'une apostille est d'environ 15 euros.
Faire évoluer une convention qui donne satisfaction
Dans ces conditions, pourquoi vouloir faire évoluer une convention qui donne satisfaction ?
Dans de nombreux Etats, l'apostille est entièrement préparée manuellement, ce qui génère un travail plutôt fastidieux. Par ailleurs, il s'avère que l'origine du document n'est pas toujours vérifiée avant l'apostille. Dans certains Etats, l'apostille est simplement agrafée au document qu'elle concerne, ce qui présente un problème de sécurité. Dans d'autres pays où de nombreuses apostilles sont délivrées, l'utilisation d'un tampon peut présenter également des problèmes de sécurisation (vol ou utilisation frauduleuse des tampons). Un autre aspect est qu'il apparait que les registres des apostilles ne sont consultés qu'à titre exceptionnel.
Ce projet e-APP devrait permettre de faire rentrer l'apostille dans le 21e siècle et dans la dématérialisation, sans qu'il soit besoin de modifier le texte de la convention ou d'y annexer un protocole. En effet, il n'est fait aucune référence dans le corps de la convention à une technologie particulière.
M. Bernasconi a ensuite présenté les deux éléments principaux composant l'e-apostille : l'e-apostille elle-même et son registre. Le récipiendaire a la possibilité de vérifier l'origine de l'e-apostille, sur Internet, à l'aide d'une Url ou d'un e-Registre, en utilisant le numéro de l'apostille ou sa date, ou encore en obtenant une réponse automatique, avec éventuellement la possibilité de consulter une copie ou image de l'apostille elle-même. La Conférence de La Haye encourage les autorités compétentes à certifier les e-Apostilles en utilisant de préférence un logiciel répandu couplé avec un système de signature électronique.
José de la Mata Amaya a présenté les avancées en la matière dans son pays, où il est effectivement possible de traiter de façon électronique le processus tout entier, de façon simple et sécurisée.
Au cours de la journée, plusieurs tables rondes se sont tenues sur la mise en place de l'e-Apostille dans les différents pays, sur le type d'informations qui devraient apparaître dans les e-Registres, comment l'e-Apostille peut améliorer le service rendu aux usagers, qui doit être autorité compétente, et également sur la question de l'émission des e-Apostilles pour des documents électroniques ou papier.
A la fin de la réunion, des recommandations ont été préparées et adoptées par les participants du séminaire.
Le prochain atelier sur le projet e-APP se tiendra le 27 mai 2011 à Prague (République tchèque).
Pour plus d'informations, voir le site de la Conférence de La Haye de droit international privé (
http://www.hcch.net) et son espace apostille :
http://www.hcch.net/index_fr.php?act=text.display&tid=37