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Dernière mise à jour : 
03/12/2019
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Vers une nouvelle quotité insaisissable

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Les huissiers de justice néerlandais s’investissent pour obtenir plus de clarté juridique

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Depuis quelque temps déjà, des bruits courent sur le fait que la réglementation en matière de quotité insaisissable laisse à désirer aux Pays-Bas. Vu la relative complexité du calcul de la quotité insaisissable dans certains cas, il n'est pas toujours simple pour le justiciable (ou celui qui l'assiste) de contrôler si le calcul effectué est correct. Il convient d'y ajouter que plusieurs sites Web utilisent un programme de calcul, mais les résultats divergent parfois d'un site à l'autre. Tout ceci a incité le Comité directeur de la KBvG (Koninklijke Beroepsorganisatie van Gerechtsdeurwaarders - Organisation professionnelle néerlandaise des huissiers de justice) à demander un examen approfondi de la question pour plus de clarté. Il a été demandé à plusieurs experts de cette catégorie professionnelle ou externes à celle-ci de donner leur avis et ces avis ont abouti à un rapport préalable intitulé « Naar een nieuwe beslagvrije voet. Vereenvoudiging in een tweetrapsraket. » (Vers une nouvelle quotité insaisissable. Une simplification sous forme de fusée à deux étages) (1) , présenté le 30 juin. Dans cette communication, le rapport préalable est abordé dans les grandes lignes.

Par Me J. Rijsdijk et Prof. Me A. W. Jongbloed

Contexte au sens large

Le rapport préalable esquisse en premier lieu les contours de la saisie-arrêt et la place qu'y occupe la quotité insaisissable. Ont été ainsi cartographiés les questions et les problèmes portant sur le caractère juridictionnel de la saisie-arrêt qui se posent également lors de l'application (et du calcul) de la quotité insaisissable. Il convient de noter que la quotité insaisissable doit être considérée dans le cadre de la saisie-arrêt en tant que saisie-revendication. Il faut par ailleurs s'attarder sur la question de savoir la mesure dans laquelle une saisie est possible pour des créances pécuniaires existantes et futures (peut-on déjà effectuer une saisie sur un salaire futur ?), sur les conséquences pour le saisissant d'une faillite éventuelle du tiers acquéreur, sur l'obligation de déclaration visée à l'article 476a C. pr. civ. et, enfin, sur la relation entre la saisie-arrêt, d'une part et d'autre part, les dispositions de volonté, les droits de suspension et la compensation.

Sont également traités la genèse de la quotité insaisissable (pendant la période des environs de 1800 à 1981) et le contexte social de ces trois dernières décennies. Pour beaucoup, il va de soi que la réglementation en matière de quotité insaisissable s'aligne sur le montant de l'allocation prévue par la WWB (Wet Werk en Bijstand - Loi sur le travail et l'assistance sociale) (soit 90 % de la norme d'assistance applicable au débiteur), mais ce n'est qu'au début du vingtième siècle (lorsque le contrat de travail fut soumis à des dispositions légales) (2), après de longs antécédents parlementaires, qu'est apparue pour la première fois une limitation de la saisie sur salaire à la base chez l'employeur, et l'association citée n'intervint qu'en 1981, date à laquelle la quotité insaisissable entra dans le cadre de la législation en matière de protection sociale (3). Le rapport préalable inclut la description des différents développements et l'analyse de la quotité insaisissable à la lumière de l'État providence, de la société du bien-être et de l'État participatif. Ceci jette une base solide pour la discussion ultérieure sur la question.

La comparaison des droits

Ce n'est qu'en comparant les droits qu'on peut apprécier à sa juste valeur son propre système juridique et qu'on peut évaluer si un autre système ou une autre structuration de ce système ne donne pas de meilleurs résultats. Il est tout à fait possible qu'ailleurs on ait choisi un système moins détaillé, mais pour lequel il faut néanmoins se poser la question de savoir dans quelle mesure il conduit à des solutions déraisonnables. Le fait qu'il soit plus simple pour un débiteur de contrôler le montant applicable et si aucune faute n'a été faite dans le calcul est un atout. Un point faible pourrait être que certains groupes se retrouveraient plutôt dans l'embarras, puisqu'il n'est tenu aucun compte de la situation réelle dans un système fonctionnant avec des forfaits.

Dans le rapport préalable, la réglementation néerlandaise est comparée à celle de 24 autres pays européens. Le choix s'est arrêté sur une discussion sur le fonds (plus) approfondie de la quotité insaisissable dans les pays qui nous entourent. La discussion porte sur le droit des pays situés au sud (Belgique et France), à l'est (Allemagne) et à l'ouest (Angleterre, pays de Galles et Écosse) des Pays-Bas (4) . Ces pays sont d'ailleurs passés au crible en raison du fait que le droit en vigueur dans ceux-ci n'est pas trop éloigné de la situation néerlandaise, de sorte qu'on puisse escompter y trouver les points de repère nécessaires. La question est alors de savoir : que peut apprendre le législateur ou le juge néerlandais du droit de ces pays ? Ceci explique également pourquoi la plus grande attention est prêtée à la Belgique : c'est un pays limitrophe qui parle la même langue, qui a un système juridique analogue et dans lequel on peut puiser le plus d'informations.

Un certain nombre d'autres pays sont également dignes d'intérêt puisque la législation en la matière y est souvent (plus) récente, d'autant plus qu'ils accordent parfois plus d'attention à la quotité insaisissable à la lumière de la sécurité sociale. Dans certains pays, tels que l'Allemagne, la France et l'Espagne, il est intéressant de constater qu'ils utilisent un système fragmenté appliquant différents pourcentages sur l'échelle des revenus : plus les revenus sont élevés et plus le volume de la saisie peut être important.

L'état actuel du droit

Le rapport préalable couvre dans le détail la réglementation actuelle en matière de quotité insaisissable, tout en attachant de l'importance à la littérature et à la jurisprudence pertinentes, ainsi qu'aux différences fondamentales existant dans la pratique pour ce qui est de l'application de la réglementation. Quel est le degré d'application de l'article 3:276 C. civ. (« Tenzij de wet of een overeenkomst anders bepaalt, kan een schuldeiser zijn vordering op alle goederen van zijn schuldeiser verhalen » - « À moins que la loi ou un accord n'en dispose autrement, un créancier peut recouvrer sa créance sur tous les biens de son créancier ») et de l'article 435, alinéa 1 (« Het staat de executant vrij te gelijker tijd beslag te leggen op alle voor verhaal vatbare goederen, waartoe hij bevoegd is zijn vordering te verhalen » - « L'exécutant est libre de saisir simultanément tous les biens susceptibles de récupération auxquels il est habilité pour recouvrer sa créance »), et quelle nuance offre l'article 6:2 C. civ., dont le premier alinéa stipule que le créancier et le débiteur doivent se comporter l'un vis-à-vis de l'autre conformément aux exigences de la raison et de l'équité ?

N'est pas uniquement traitée sous cette optique la quotité insaisissable, telle que réglementée dans le code de procédure civile, mais d'autres réglementations, à savoir la restitution fiscale provisoire, les prestations sociales, les retraites, les rentes viagères et les prestations de l'assurance épargne-rente viagère, les indemnités d'assurances, la pension alimentaire, les allocations aux victimes de guerre et la rémunération de fonctionnaires, sont également abordées. Sont en outre passés en revue les créances publiques (art. 19 de la IW (Invorderingswet - Loi néerlandaise sur le recouvrement des impôts) de 1990)), la récupération en vertu de la législation néerlandaise en matière de sécurité sociale (art. 60 de la WWB (Wet Werk en Bijstand - Loi néerlandaise sur le travail et l'assistance sociale)), la prime administrative (art. 18f de la ZVW (Zorgverzekeringswet - Loi néerlandaise sur l'assurance soins de santé)) et le montant non saisissable dans le cadre de l'assainissement des dettes (art. 295, alinéas 2 et 3 de la FW (Faillissementswet - Loi néerlandaise sur l'insolvabilité)). La conclusion pouvant être tirée sur la base de ces discussions est la mise sous pression du minimum vital garanti par la quotité insaisissable dans d'autres lois, à l'exception de la WSNP (Wet Schuldsanering Natuurlijke Personen - Loi néerlandaise relative à la remise de dettes de personnes physiques).

Il y a donc lieu d'ouvrir un débat fondamental sur la question du degré d'admissibilité d'une infraction sur le minimum vital. L'idée en soi est logique, d'autant plus lorsqu'il existe de fortes présomptions que le débiteur dispose de revenus plus élevés que ceux qu'il déclare et si ce fait peut être établi via des voies officielles. Dans ce cas, le débiteur n'est plus de bonne foi et, si la présomption s'avère exacte, il disposera encore toujours de revenus suffisants pour garantir un certain minimum vital. Une infraction sur le minimum vital en guise de sanction, mais sans indication que le débiteur dissimule des revenus à son ou ses créanciers au titre de recouvrement, semble cependant douteuse et contradictoire avec le principe de base selon lequel un certain minimum vital doit être disponible pour tout un chacun. Par ailleurs, de tels droits renforcent l'inégalité juridique entre les différents créanciers, alors que c'est justement le principe d'égalité des créanciers qui devrait être maintenu et garanti dans la mesure du possible (5) .

Soutien suffisant

Il va de soi que les propositions faites doivent être accueillies à bras ouverts. C'est la raison pour laquelle la parole est donnée, dans le rapport préalable, à un groupe de personnes ou à des organisations du monde politique et au contact de la réalité importants pour la KBvG sur l'éventuelle révision de la quotité insaisissable. Outre l'avis des députés, l'opinion de représentants de l'administration fiscale, de communes, du Bureau national du médiateur, du Bureau WSNP, de l'Association néerlandaise d'aide au surendettement et de banques sociales NVVK, de la banque néerlandaise d'assurances sociales SVB, de l'Institut néerlandais de gestion des assurances pour les salariés UWV et de la Vereniging Eigen Huis (Organisation des Propriétaires d'un Logement) a également été sondée. Ceci a permis de dégager clairement les problèmes existant dans la pratique et les solutions pouvant tabler sur un soutien suffisant (6).

Ce soutien doit également exister parmi les huissiers de justice. À ce stade, il convient de poser la question suivante : que pense cette catégorie professionnelle de la quotité insaisissable ? C'est une question primordiale puisqu'en 2013 courait de manière sporadique le bruit que la quotité insaisissable ne garantirait plus un minimum vital pour les débiteurs, en raison de la complexité croissante de la société depuis l'entrée en vigueur de la réglementation. Dans le rapport préalable, la parole est donnée à la catégorie professionnelle elle-même (environ la moitié des membres de la KBvG ont réagi, de sorte qu'on puisse parler d'une opinion représentative) pour se prononcer sur une simplification des articles 475b-g C. pr. civ. et le traitement de la saisie-arrêt (art. 478 C. pr. civ.) y est également abordé par rapport aux créances privilégiées.

Il s'avère que la majorité des sondés (70 %) estiment que le fonctionnement de la quotité insaisissable laisse à désirer dans la pratique. Ils jugent l'application de la quotité insaisissable compliquée et signalent un certain nombre de problèmes découlant d'incomplétudes dans la réglementation elle-même, d'une part et d'autre part, d'imperfections dans le système du droit d'exécution, du droit des saisies et du droit de recouvrement. En revanche, une petite minorité (29 %) a émis un avis positif sur le fonctionnement de la quotité insaisissable. Les sondés de cette catégorie déclarent trouver logique la systématique de la réglementation. L'article 475d C. pr. civ. doit être parcouru dans un ordre fixe pour pouvoir calculer la quotité insaisissable, bien que dans la pratique l'ordre à suivre soit débattu. Il existe par ailleurs des programmes de calcul pouvant faciliter la détermination de la quotité insaisissable.

Une fusée à deux étages


Comme la législation est un processus complexe souvent de longue haleine, deux solutions sont présentées. La première solution porte sur le court terme, puisqu'il est important que le calcul de la quotité insaisissable soit rendu plus intelligible dans un avenir proche. Ce modèle à court terme a pour objectif d'améliorer l'applicabilité pratique de la quotité insaisissable au sein du contexte social existant. Les adaptations proposées pour l'article 475g C. pr. civ. (7)  et le nouvel article 475ga C. pr. civ. (8) doivent notamment y contribuer.

Pour le (plus) long terme, le législateur doit préparer des révisions plus structurelles en vue de simplifier le système actuel. Ces changements ne doivent pas être considérés indépendamment des modifications à apporter et impliquant d'autres départements. Il faut notamment considérer les plans de révision de la législation fiscale (cf. le rapport de la commission Van Dijkhuizen) (9) et l'élimination de la fraude au moyen d'allocations (même s'il s'avère impossible d'introduire une allocation de foyer (10) à court terme) (11). Dans ce cadre, six recommandations sont formulées à l'attention du secrétaire d'État à la Sécurité et à la Justice et du secrétaire d'État aux Affaires sociales et à l'Emploi :
1.    Remplacer le système complexe actuel se référant à une multitude de normes d'assistance applicables par un système de seuils progressif.
2.    Remplacer l'énumération des revenus périodiques (pouvant être) liés à une quotité insaisissable par une description qui se substitue à l'article 475c C. pr. civ. et à l'article 475e, alinéa 1, C. pr. civ. proposé.
3.    Reconsidérer l'article 45 de l'AWIR (Algemene Wet Inkomensafhankelijke Regelingen - Loi générale sur les régimes sous condition de ressources).
4.    Prendre une mesure visant l'impossibilité de recouvrement jusqu'à la quotité insaisissable sur un compte bancaire où sont versées les prestations périodiques du débiteur.
5.    Améliorer le lien entre les règles générales en matière de saisie et les pouvoirs de recouvrement des autorités.
6.    Charger également l'huissier de justice, qui supervise le recouvrement en cas de saisies multiples (art. 478 C. pr. civ.), de la fixation de la quotité insaisissable au profit des autres saisissants.

Avec ce rapport préalable, la KBvG établit clairement qu'il faut adapter la réglementation actuelle. Plusieurs options sont avancées en vue d'une modification à court et plus long terme, afin que la législation néerlandaise se mette plus au diapason des législations étrangères sur ce point. Des considérations politico-juridiques joueront certes un rôle en la matière, mais il ne fait aucun doute que ce rapport préalable donne une impulsion au débat et qu'il contient suffisamment d'arguments pour alimenter la discussion. Il incombe désormais au législateur néerlandais de donner suite à ce rapport préalable !



Notes

1. Le rapport préalable a été rédigé par Me J. Rijsdijk, Me O. M. Jans et Me J. Feikema. Les autres auteurs qui y ont contribué sont : Me J. J. L. Boudewijn, Me Dr L. P. Broekveldt, Me M. I. Cazemier, Me B. T. M. Duivenvoorden, Prof. Me A. W. Jongbloed, J. Nijenhuis, Me E. van der Ploeg, Prof. Me F. R. Salomons et A. C. C. M. Uitdehaag.

2. Loi du 13 juillet 1907, Stb. 1907, 193.

3. Loi du 11 mars 1981, Stb. 1981, 111.

4. Les pays discutés dans les grandes lignes sont : l'Azerbaïdjan, la Bulgarie, l'Estonie, la Géorgie, la Grèce, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, la Moldavie, la Norvège, la Pologne, le Portugal, la Roumanie, la Serbie, la Slovénie, l'Espagne, la République tchèque et la Suède.

5. Il y a longtemps que ce n'est plus le cas. D'après Huls, l'égalité entre créanciers (paritas creditorum) a complètement volé en éclats ; de Gerechtsdeurwaarder 2014, nº 1, p. 14.

6. L'obligation d'information des débiteurs est considérée par les politiciens comme le principal problème de la réglementation actuelle. Tout comme les politiciens, les organisations au contact de la réalité estiment que l'obligation d'information des débiteurs ne suffit pas, mais elles franchissent une étape supplémentaire : outre le fait que ce problème au sein de la réglementation actuelle, qu'elles qualifient de lacune de taille, doit être résolu, elles aimeraient également que la réglementation en question soit simplifiée. Certaines organisations vont même plus loin que d'autres : quelques-unes plaident pour la réduction du nombre de variables, d'autres seraient plutôt en faveur de barèmes fixes et une seule, s'appuyant sur le principe de la transparence maximale, va même jusqu'à argumenter que la quotité insaisissable de quelqu'un doit tout simplement pouvoir être déduite d'un tableau ; Rijsdijk, Jans & Feikema 2014 (red.), Naar een nieuwe beslagvrije voet. Vereenvoudiging in een tweetrapsraket, La Haye : Sdu Uitgevers 2014.

7. L'une des adaptations de cet article concerne la clarification et un règlement plus efficace quant à l'utilisation du numéro d'identification sociale et fiscale par l'huissier de justice en relation avec la quotité insaisissable ; idem, p. 317 et 318.

8. Une amélioration de l'obtention d'informations par l'huissier de justice est proposée pour cet article ; idem, p. 318-320.

9. Naar een activerender belastingstelsel, Eindrapport, Commissie inkomstenbelasting en toeslagen, Van Dijkhuizen e.a., juin 2013.

10. En ce qui concerne l'allocation de foyer, les prestations actuelles, à savoir les allocations de soins de santé, le budget lié aux enfants, l'indemnité de logement et les prestations aux personnes âgées, sont regroupées en une seule allocation par ménage.

11. Le plan initial prévoyait l'introduction échelonnée de l'allocation de foyer à partir de 2015 ; Miljoenennota 2014, p. 75 et suivantes, à consulter sur le site Web www.rijksfinancien.nl/fbcontent.ashx/downloads/Miljoenennota_2014.pdf#page=75. En raison de problèmes d'exécution constatés, sa mise en œuvre a entre-temps été reportée à une date ultérieure à préciser ; lettre du 14 avril 2014 relative à l'allocation de foyer que le ministre des Affaires sociales et de l'Emploi et le secrétaire d'État aux Finances ont adressée à la Chambre des Représentants, à consulter sur le site Web : www.rijksoverheid.nl/ministeries/szw/documenten-en-publicaties/kamerstukken/2014/04/14/kamerbrief-over-de-huishoudentoeslag.html.
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