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Au service de la profession d’huissier de justice dans le monde depuis 1952
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Audition CEPEJ du 1er décembre 2004 - Seconde partie

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En qualité de membre observateur au sein de la Commission européenne pour l'efficacité de la Justice (CEPEJ), l'UIHJ a participé à une réunion qui s'est tenue le 1er décembre 2004 à Strasbourg, au siège du Conseil de l'Europe. La contribution de l'UIHJ, présentée par son secrétaire, Bernard Menut, est retranscrite ci-dessous.

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Grille pilote pour l'évaluation des systèmes judiciaires

La quasi totalité des pays membres du Conseil de l'Europe comporte une représentation au sein de l'UIHJ, et notamment de nombreux pays d'Europe de l'Est ou issus de l'éclatement de l'Union soviétique. L'UIHJ regroupe les associations nationales ou chambres nationales d'huissier de justice, qu'il s'agisse de professionnels libéraux ou de fonctionnaires, de 65 pays dans le monde (date au 30 novembre 2004).

Une coopération s'est établie entre l'UIHJ et le Conseil de l'Europe, qui fait appel à certains membres de l'UIHJ pour mener des actions d'expertises dans divers pays. C'est ainsi que des experts, membres de l'UIHJ, ont accompli récemment des missions en Albanie, Bulgarie, Georgie, Moldavie, Russie, et l'UIHJ est partenaire du projet d'une école de formation des huissiers de justice à Varna en Bulgarie.

L'UIHJ entend poursuivre de façon soutenue, sa collaboration avec le Conseil de l'Europe, et fournir le soutien de ses experts pour aider au développement des objectifs du Conseil de l'Europe. Forte de son implantation mondiale, et de sa parfaite connaissance des systèmes judiciaires et des agents de signification et d'exécution, l'UIHJ peut très utilement apporter les observations des praticiens, et leurs propositions pour une amélioration de la justice au service des citoyens.

En préambule des observations et réponses à la grille d'évaluation, l'UIHJ rappelle la contribution générale qu'elle a fait parvenir à la commission le 9 juin 2004 à l'occasion de sa dernière audition. Cette contribution définit les axes principaux de l'amélioration de la justice selon l'UIHJ.

1. GRILLE PILOTE - ELABORATION

L'UIHJ ne méconnaît pas la difficulté de la conception d'une grille d'évaluation, et elle salue le travail conséquent effectué. L'UIHJ a entendu concentrer ses observations sur le point X de la grille qui concerne plus particulièrement les agents d'exécution et l'exécution des décisions de justice.

Une première observation, qui ne saurait être un reproche, mais s'avère être plus un regret, est le caractère trop général des questions posées, et le nombre important de questions relatives aux sanctions contre les agents d'exécution. L'UIHJ relève d'ailleurs que ceci vaut aussi pour d'autres professionnels.

Une deuxième observation concerne l'orientation trop "pénale" de la grille. En effet, en Europe, l'activité des huissiers de justice et agents d'exécution est très majoritairement orientée vers l'exécution des décisions civiles et commerciales, et peu vers l'exécution des décisions pénales, à l'exception du recouvrement des amendes. Ce point n'a donc pas été pris suffisamment en compte par la grille pilote.
 
A titre de troisième observation générale, il convient de ne pas faire d'amalgame entre la notion d'efficacité, ou plutôt de non efficacité, et les sanctions, qu'elles soient disciplinaires ou pénales.

L'efficacité ou la non efficacité d'un système ne saurait se mesurer à l'aune du nombre de sanctions prononcées à l'encontre de ses membres.
L'efficacité est avant tout une question de moyens, moyens humains, techniques, mais surtout procéduraux, pour permettre l'exécution des décisions de justice. Le meilleur professionnel en Europe dans son métier (juge, avocat, greffiers, notaires, huissiers de justice) ne saurait être efficace si les outils dont il dispose sont d'un autre âge, ou si lourds et inadaptés, qu'ils ne permettent pas d'agir efficacement.
 
Aussi, l'UIHJ appelle de ses vœux l'élaboration d'un questionnaire plus affiné, à l'élaboration duquel elle se propose de collaborer, pour inventorier les points de blocage de l'exécution des décisions de justice.

Tableau

Pays Huissiers de justice Statut Déontologie/discipline Nombre de réclamations Responsabilité
 ALLEMAGNE  4800  Fonctionnaire Contrôle assuré par le supérieur  hiérarchique. Les agents sous l'autorité du directeur (un juge) de l'Amtsgericht et contrôlés (2 à 4 fois par an) par un fonctionnaire du Landgericht ayant rang de Rechtspfleger, le Prufungsbeamter  (le citoyen peut se plaindre par simple courrier) auprès du directeur de l'Amtsgericht. Inconnu mais très peu. Information décentralisée au niveau des Amtsgerichts
(réprimande, diminution de la rémunération, suspension, destitution après sanction pénale
 
 BELGIQUE  520  Libéral  Chambre d'arrondissement  Inconnu Collective avec une couverture obligatoire par une assurance personnelle
 DANEMARK  60 (travaillent "Enforcement of private claims") Fonctionnaires  Le président de la High Court  Inconnu L'administration du tribunal (Responsabilité de l'Etat)
 ESTONIE  72  Libéral  Ministère de la justice  122 réclamations Assurance de responsabilité
 FRANCE   3 300  Libéral  Chambre départementale
Tribunal de grande instance
Inconnu car tenu par chaque parquet Caisse de garantie nationale pour les dommages causés
 HONGRIE  202  Libéral Chambre nationale des huissiers de justice et Tribunal pour les pénalités financières 298 réclamations en 2004 dont la totalité n'est pas fondée Assurance de responsabilité obligatoire pour les dommages causés
 LETTONIE  113  Libéral Conseil des huissiers de justice et le Ministère de la Justice 35 réclamations en 18 mois (29 ont donné lieu à sanction, dont 1 à radiation)  District court
 LITUANIE  124  Libéral Présidium de la Chambre nationale
Ministère de la justice
 6 en 2004  Cour nationale
POLOGNE  585  Libéral Chambre nationale et tribunal de première instance  Inconnu Assurance de responsabilité obligatoire pour chaque huissier de justice et pour chaque Etude d'huissier de justice
 PORTUGAL 453 à statut libéral et 9000 fonctionnaires judiciaires d'Etat à compétences complémentaires Libéral Camara dos Solicitadores (chambre professionnelle)  28 sur 12 mois (juillet 2003 à juillet 2004) mais seulement 2 cas avec sanctions Assurance de responsabilité limité à 100 000 euros
 SUEDE  200 Fonctionnaires Tribunal de grande instance Inconnu mais très peu Tribunal de grande instance - chancelier de la justice
 
3. POINT 103 - SYSTEME DE SUPERVISION ET CONTROLE
 
Deux types d'agents d'exécution existent en Europe. L'un au statut indépendant et libéral (actuellement majoritaire) et l'autre au statut fonctionnaire. Selon le statut de l'agent, les systèmes de supervision et de contrôle diffèrent.
 
3-1 Supervision de l'activité

3-1-1 Dans son volume
Elle est possible pour un fonctionnaire, mais demeure assez difficile, voire impossible pour un professionnel libéral. Cependant, par le biais de répertoires ou de registres voire de taxation des actes de l'agent indépendant, les Etats peuvent parfois disposer d'informations quantitative de l'activité des agents d'exécution. Toutefois, le collationnement de telles informations n'est pas possible pour l'UIHJ.
 
3-1-2 Dans sa qualité
Elle est possible pour le fonctionnaire, mais également pour l'agent indépendant. En effet, le nombre de réclamations faites à l'encontre des agents peut apparaître comme un indicateur intéressant. Toutefois, cet indicateur n'est pas suffisamment pertinent, car il faut défalquer des réclamations, toutes celles qui sont relatives au principe de l'exécution elle-même de la décision de justice, ou encore celles qui sollicitent des délais pour l'exécution et le paiement.
 
Conclusion
La mise au point d'un indicateur de qualité s'avère donc très difficile, mais avant tout, la collecte de données statistiques est souvent impossible dans les pays.
 
3-2 Contrôle de l'activité
 
Il s'agit du contrôle de la régularité des actions menées par les agents d'exécution au regard de la loi. Ce contrôle revêt selon les pays deux types.
 
3-2-1 Contrôle a priori
C'est un tiers qui contrôle à priori la légalité de la mesure, et l'autorise, et en confie l'exécution matérielle à l'agent d'exécution.
Ce système est extrêmement lourd, et produit un engorgement du système d'exécution voire sa paralysie complète. Il a été abandonné par de nombreux pays, car il mobilisait trop de ressources humaines.
 
3-2-2 Contrôle a posteriori
C'est le système qui paraît avoir les faveurs des législateurs actuellement, car il est moins coûteux en ressources humaines, et fait confiance à l'agent d'exécution.
Le contrôle s'opère donc après l'exécution de la mesure, et seulement sur les mesures qui font l'objet d'une contestation par l'une des parties. Ainsi, le contrôle est plus fin, et plus pertinent.

Toutefois, il convient de noter que même si l'affaire fait l'objet d'un contrôle à posteriori, l'agent d'exécution voit son action confirmée dans plus de la majorité des cas examinés.
Selon le cas, le contrôle à posteriori est dévolu à un supérieur hiérarchique de l'agent (système fonctionnaire) ou à un juge (système indépendant).


4. POINT 104 - NOMBRE DE PROCEDURES DISCIPLINAIRES

Ce point est extrêmement difficile à compléter, dans la mesure où certains pays ne connaissent pas une centralisation des données concernant les cas disciplinaires  . Aussi, l'UIHJ a procédé à une enquête auprès de ses membres, pour obtenir des réponses, qui sont d'ailleurs partielles.
Il est d'ailleurs peu probable que d'autres sources (ministérielles) puissent obtenir des informations plus précises.
 
Cela permet de conclure que cet indicateur présente une valeur relative quant à la mesure de l'efficacité de la justice en Europe.
Cependant, il est permis de constater que dans chaque pays où les données ont pu être fournies, même si elles demeurent partielles, le nombre d'actions disciplinaires est faible au regard de la population des agents d'exécution, et au regard de l'activité qu'ils déploient.
 

5. POINT 105 - NOMBRE DE SANCTIONS
 
Les observations pour se point sont les mêmes que celles faites pour le point 104 quant aux données obtenues et quant à la pertinence de cet indicateur pour mesurer l'efficacité de la justice.
L'examen en instance disciplinaire ne conduit pas systématiquement, et loin s'en faut, au prononcé de sanctions.

Cela démontre que parfois les demandes faites à l'encontre des professionnels sont fantaisistes, et ont parfois pour objet de déstabiliser l'agent d'exécution dans la conduite de ses missions.
 

6. POINT 106 - POSSIBILITE DE SE PLAINDRE
 
Le droit de contester l'action de l'agent d'exécution paraît exister partout. Selon le cas, c'est auprès du supérieur hiérarchique (fonctionnaire) ou d'une autorité judiciaire ou professionnelle (statut indépendant) que la possibilité est offerte au plaignant.
 
Le mode de contestation est souple (lettre, démarche personnelle). Certains pays admettent même la contestation par e-mail.
L'UIHJ a pu constater que selon la qualité du plaignant, les demandes diffèrent
 
6-1 Réclamation émanant du demandeur à l'action
 
Ce dernier se plaint généralement de la lenteur de l'action de l'agent d'exécution. C'est évidemment le résultat d'une légitime impatience du demandeur de récupérer ce que la justice lui a reconnu comme droit. La place de l'agent d'exécution dans la chaîne (en dernier) renforce à son égard les frustrations.

Mais ce type de réclamation est souvent la conséquence de législations protectrices du défendeur, et de l'octroi de délais de procédure parfois longs.
Enfin, la faculté contributive du débiteur limitée (par ses ressources et parfois par la loi elle-même dans le volume des ressources saisissables) accroît la frustration du demandeur, et donc ses réclamations.

 6-2 Réclamation émanant du défendeur à l'action

Le défendeur à l'action se plaint de la non prise en compte de son point de vue (pourtant le jugement a tranché) et par ailleurs il trouve à l'inverse du demandeur, que l'agent d'exécution agit trop rapidement.
 
Conclusion
La qualité des réclamations montre que pour le demandeur, l'action de l'agent d'exécution n'est pas assez rapide, alors que pour le défendeur, elle l'est souvent trop.
Cet antagonisme est insoluble et montre qu'il est difficile de faire d'une telle donnée, un indicateur pertinent pour l'efficacité de l'exécution, et donc de la justice.
 

7. POINT 107 - ROLE DU TRIBUNAL
 
Le rôle de la juridiction ou du juge varie selon le système d'exécution envisagé. Ce rôle est très important quantitativement lorsque le juge conduit lui-même l'exécution (mais nous avons vu  que cela conduit à l'engorgement des juridictions) et il est moindre en volume, lorsque le juge est chargé d'un contrôle a posteriori.
L'expérience démontre qu'il est plus pertinent d'avoir un juge chargé du contrôle, qu'un juge chargé de l'initiative.
 
L'UIHJ considère qu'il revient de donner toute sa place au juge, dans l'acte de juger, et donc de lui laisser les moyens en temps pour exercer cette mission. L'exécution ne relève pas du domaine du juge. Il doit dire le droit, trancher les litiges, et contrôler les éventuelles erreurs de l'agent d'exécution lorsqu'il est sollicité par l'une des parties.
 
L'UIHJ a pu constater que chaque fois que le juge est chargé du suivi de l'exécution, et de son initiation, le système judiciaire est engorgé, et l'exécution paralysée, car elle nécessite un retour vers le juge pour lui rendre compte de la mission, et lui demander l'autorisation d'agir à nouveau sur d'autres actifs du débiteur.
Nous sommes alors en présence d'un effet "entonnoir" qui paralyse le système.
 
L'UIHJ considère que la présence d'un tel système (où le juge dirige l'exécution) est en lui-même, pour le système judiciaire qui le possède, la preuve d'un facteur d'inefficacité immédiat ou latent de la justice et de l'exécution.
 

8. POINT 108 - POUVOIR DU TRIBUNAL

Selon l'UIHJ, cette question doit être rapprochée du système judiciaire et non pas de l'exécution des décisions de justice.
 

9. CONCLUSION

L'UIHJ considère que l'évaluation des systèmes judiciaires est utile et indispensable, mais qu'il faut se garder de limiter cette comparaison à de simples chiffres, lesquels sont parfois trompeurs et doivent être replacés dans leur environnement national.
 
L'UIHJ considère que l'information du justiciable est essentielle et spécialement pour le défendeur, souvent placé en position d'infériorité, sans toutefois qu'il soit, comme on le croit souvent à tort, en situation de vulnérabilité.

Aussi, l'UIHJ considère que l'information, et la qualité de celle-ci auprès des personnes concernées par l'acte de justice, est un élément essentiel de la pertinence d'un système judiciaire. Le contact personnel avec les parties doit être privilégié et renforcer, afin de lutter contre le nombre de décisions rendues par défaut. Voilà un indicateur d'une justice efficace, et d'un procès équitable, qui par ailleurs intègre l'exécution de la décision de justice.
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